L’hygiène défaillante va donner au parfum un nouvel élan. Trois pays émergeront nettement : l’Espagne, l’Italie et la France qui deviendront très vite, sous l’influence de la culture arabe, les principaux centres de commerce et d’échanges où apothicaires, marchands d’épices et d’herbes feront circuler leurs trouvailles. L’Italie, avec la main mise de Gênes et Venise sur le commerce méditerranéen, aura beau jeu de récupérer à bon prix tous les épices possibles et inimaginables en provenance de l’Inde et du Proche-Orient. En France, le mariage de Catherine de Médicis avec Henri II en 1533 ne passera pas inaperçu (elle viendra d’ailleurs à la Cour avec son parfumeur personnel, ses cuisiniers et ses pâtissiers).
Le métier de parfumeur va alors très vite acquérir ses lettres de noblesse et les maîtres gantiers-parfumeurs de cette époque resteront à jamais les ancêtres des parfumeurs d’aujourd’hui. Grasse sera pour des décennies la capitale européenne de production de fleurs et de parfums. Les matières premières comme le musc, le patchouli, le vétiver ou le santal arriveront en France grâce à la Compagnie des Indes qui contribuera à terme au développement et à l’indépendance de notre parfumerie.
L’oranger, et on parlait plutôt de limonier, tout comme pour le citronnier dans les temps antiques, fut longtemps recherché pour son avantage médicinal. Ramené par les Croisés qui avaient fait de Hyères leur port d’embarquement pour la Terre Sainte, il va prendre racines en Provence et l’essence que les parfumeurs sauront tirer de sa fleur, connaîtra de ce fait un très bel essor. En 1566, on pouvait lire dans les récits de Charles IV que “ les orangers, les palmiers et les poivriers étaient si nombreux aux alentours de la ville qu’ils étaient comme une forêt”. Faute de chaleur suffisante, la culture de l’oranger dans notre pays restera anecdotique. De nouvelles senteurs se feront jour : vanille, cacao, baume de Pérou, baume de Tolu, fève Tonka du Brésil, benjoin de Sumatra.
À la Cour de Louis XIV (dit le “doux fleurant” mais pas fan pour un sou des bains), tout était parfumé : gants, mouchoirs, draps, perruques et chapelets. Quant à Madame de Trémoille (surnommée “ la Nérola”), elle ne sortait jamais sans ses gants parfumés à la fleur d’oranger. Ces gants “guanti di Neroli” auraient-ils donné leur nom à l’essence de Neroli ?